Installé à La Haie-Traversaine, en Mayenne, l’Atelier MCO (Menuiseries et charpentes de l’Ouest) intervient principalement sur le marché du bâti ancien, en se spécialisant dans la fabrication traditionnelle et la pose de menuiseries en bois. La mise en valeur du patrimoine historique et la transmission d’un savoir-faire rare aux jeunes générations sont les principaux objectifs poursuivis par son dirigeant, Arnaud de Vitton.
L’entreprise familiale, fondée en 1948 à Ambrières-les-Vallées par Robert Camblong et transmise ensuite à son fils Bernard, a au départ, comme son nom l’indique, deux activités : charpente et menuiserie. La première va disparaître progressivement et c’est la fabrication de menuiseries qui se développera jusqu’au début des années 2000. Lorsque Arnaud de Vitton rachète la société en 2008, celle-ci fait de la menuiserie de moyenne série pour la région parisienne et ne s’aventure pas sur le terrain du patrimoine ancien. « Quand je suis entré dans l’atelier pour la première fois, même si les locaux ne payaient pas de mine, je me suis bien rendu compte qu’il y avait vraiment de la qualité et une passion pour faire de beaux ouvrages, se souvient Arnaud de Vitton. Je ne suis pas menuisier de formation, j’arrivais du monde du traitement des déchets. Ma motivation était de travailler pour le patrimoine. »
L’entreprise a connu auparavant deux repreneurs, mais ces expériences ne se sont pas révélées positives. Pour Arnaud de Vitton, le repositionnement sur le marché prestigieux du bâti ancien était une solution évidente pour rassurer et redonner confiance à l’équipe de l’atelier, constituée à l’époque de 6 personnes. Un pari osé, mais pas complètement fou. « Nous avions des techniques de base parce qu’on travaillait essentiellement à tenon-mortaise et on fabriquait des ouvrages en bois massif. En écoutant les conseils des architectes, nous avons appris au fur et à mesure énormément de choses, notamment à récupérer et restaurer les vieilles ferrures, les volets intérieurs… »
Nouveau départ
En 2011, l’entreprise déménage à La Haie-Traversaine et s’installe dans un atelier moderne de 800 m2 qui répond aux exigences de sécurité et de confort de travail. C’est l’occasion de renouveler l’équipement et de mettre en place une installation d’aspiration de poussière. « Nous avons remplacé les machines essentielles : scie à format, scie à ruban, toupie, mortaiseuse, ponceuse large, ponceuse 4 faces, énumère le dirigeant de la société. Aujourd’hui, l’entreprise emploie 12 personnes, dont 8 menuisiers. Un responsable technique dessine des plans sur AutoCAD pour préparer la fabrication. Sur les chantiers, nous assurons nous-mêmes la dépose et la pose des menuiseries. L’équipe de deux poseurs qui s’en charge est aidée pour la manutention par des intérimaires. »
À la recherche de l’harmonie générale
Au fil du temps, l’entreprise a réussi à se faire une place sur le marché du patrimoine bâti. Maîtrisant plusieurs savoir-faire pour la réalisation de la menuiserie sur mesure, elle travaille régulièrement pour les Monuments historiques, en lien avec les architectes des Monuments historiques (AMH) et les architectes des Bâtiments de France (ABF). MCO s’adresse aussi aux particuliers. Chaque cas est unique et demande une approche personnalisée. « Certains clients sont très précis dans leurs demandes, d’autres très vagues – il faut les aider à choisir, constate Arnaud de Vitton. La consigne générale est de reprendre à l’identique, mais on a aussi le droit de réfléchir, d’observer, de comparer… Quand on revisite une façade, il est bon de se reposer des questions, de reconstituer la chronologie des différentes opérations précédentes et d’essayer de trouver l’harmonie générale. Cela ne passe pas toujours par la reconstitution à l’identique. Inutile de reproduire les mêmes erreurs deux fois ! » Labellisée « Bois de France », l’entreprise travaille en grande partie avec le chêne issu des massifs forestiers de la Mayenne et de la Sarthe. Sur certains chantiers, elle a aussi recours aux bois exotiques rouges. Menuiseries extérieures ou intérieures (bibliothèques, escaliers…), chaque ouvrage demande un traitement spécifique. Les menuiseries intérieures sont souvent peintes ou réalisées en chêne ciré. Il n’y a pas de profil type de client. Les demandes peuvent venir aussi bien de retraités que de jeunes propriétaires qui s’installent. Le dénominateur commun, c’est la passion du patrimoine. « On peut être fidèle au style ancien et aussi profiter d’un confort certain », souligne Arnaud de Vitton.
Faire le pari de la transmission
En octobre 2021, lors du Salon international du patrimoine culturel, l’Atelier MCO a été récompensé par le Prix « Métiers d’art et patrimoine bâti », créé en 2013 par Ateliers d’art de France et l’association VMF (Vieilles maisons françaises). Doté de 10 000 €, ce prix a pour vocation d’encourager la pérennité, l’accession ou le développement des métiers d’art au service du patrimoine bâti. En concurrence avec 14 autres candidats, l’entreprise mayennaise a été lauréate d’une part pour l’excellence de son travail et d’autre part pour son engagement dans la transmission de ce savoir-faire rare. « Je crois beaucoup à la capacité des jeunes à s’enthousiasmer et à trouver de belles voies professionnelles pour satisfaire leur curiosité, leur envie de bien faire et d’apprendre, déclare Arnaud de Vitton. Il y a bien sûr beaucoup de jeunes qui sont désœuvrés et qui ne savent pas comment occuper leurs journées, mais il y en a aussi qui sont tout à fait déterminés et qui savent, avec beaucoup de ténacité, apprendre et travailler pour maîtriser toutes ces techniques. » Partenaire des Compagnons du devoir, l’Atelier MCO accueille soit des jeunes qui sortent des formations et possèdent un solide bagage acquis pendant leur tour de France, soit des jeunes de la région en formation initiale. Mais il n’y a pas que de jeunes apprentis, le métier attire également des personnes entre 40 et 50 ans, en reconversion professionnelle. « Ces dernières années, avec le départ à la retraite d’anciens salariés, la moyenne d’âge est descendue à 25 ans, constate Arnaud de Vitton. La relève est assurée ! »
Anna Ader